Chapitre 2 : L'Ombre de Mérinvieux

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N'ayant pas trouvé de forme commune à tous les récits que j'ai trouvés concernant l'Ombre, je me permets de présenter cet élément de folklore Duchelois en faisant une synthèse de mes recherches.

Il est difficile de dater cette histoire. Certains la racontent comme antérieure à la guerre de Namas Cintas, d'autres postérieures et certains, moins nombreux, la situent pendant. Et ceci sans apparente raison géographique, culturelle ou familiale. Mon hypothèse est que l'Ombre est apparue plusieurs fois dans l'histoire de Merinvieux, ou du moins, que des gens ont pensé la voir, ou ont utilisé son nom pour expliquer des faits nécromantiques isolés. Et c'est là, je pense, ce qui est le plus intéressant dans cette histoire. Peu importe le récit que l'on m'en a fait, les agissements de cette créature sont basés sur un schéma bien précis. 

Tout d'abord on l'aperçoit de nuit. Un soldat éméché, un paysan de retour des champs, un enfant apeuré, peu importe, elle est toujours aperçue dans un cimetière. Alors certains courageux s'approchent, mais en s'approchant, la lumière évanouie la silhouette. Et aucun n'a été assez courageux pour s'approcher sans lumière, mais tous ont trouvé en arrivant à l’endroit où se tenait la silhouette, une tombe éventrée.

Les récits diffèrent quand on arrive au lendemain mais ceci est, je pense, lié à la proximité des villages avec le territoire des morts. Quand on s'en éloigne, le récit fait mention du corps retrouvé le lendemain, parfois intact, parfois éventré. Mais dans les régions les plus proches de la frontière, les corps sont retrouvés au lieu où ils ont travaillé avant de mourir. J'ai entendu l'histoire d'un fermier mort transportant de la paille, d'un forgeron une dernière œuvre à la main, d'un pêcheur amarant son bateau. La magie réanimant ces corps dure parfois quelques heures, au maximum quelques jours et l'histoire s'arrête là. 

Aucune histoire à propos de cette Ombre ne fait état de victimes. L'Ombre, si tant est qu'elle existe en tant qu'entité, pourrait être qualifiée de farceuse plus que de malveillante. En effet, les réanimés n'ont jamais attaqué qui que ce soit et bien que morts, le travail accompli pendant leur brève extension de vie était correct. J'ai pu observer l'épée fabriquée par le forgeron et sa qualité n'avait rien à envier des œuvres de son vivant. Ces épisodes de réanimation sont fascinants dans le sens où ils ne sont dommageables que moralement pour ceux qui ont connu le réanimé. Est ce qu'alors on pourrait considérer acceptable de créer des réanimés en travailleurs si on ne les connaissait pas de leur vivant ? Et qu'en serait-t-il de leur corps, comment réagirait-il à une réanimation prolongée ? Cela pourrait être un sujet d'étude intéressant tant, moralement que scientifiquement. 

Mais cela laisse à se demander si la malédiction de Namas Cintas n'est pas issue de considérations comme celles-ci et c'est pourquoi je voudrais mettre en garde tout lecteur dont la curiosité a été piquée. Si de telles recherches devaient être conduites un jour, ne lésinez pas quant aux précautions et sécurités autour de ces expérimentations. Car s'il y a bien quelque chose que l'on ne maîtrise pas, c'est le domaine de la mort.

 

Extrait de Légendes de

Myrek, amateur d'histoires

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